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Le hashtag #Brevet monte mollement sur les réseaux sociaux. Pour la forme, quelques politiques – Pap Ndiaye, Éric Ciotti… – adressent leurs vœux de réussite à un diplôme gonflé à l’hélium du contrôle continu qui ne fait trembler personne. Et donc ne réjouit plus quand il est décroché. Tout le monde donne le change, la presse aussi, pour laquelle, en juin, le brevet est un marronnier.
Le Figaro a délégué un jeune journaliste à Paris à la sortie du Petit Condorcet et du collège Jules-Romains, pour rendre compte du stress et de l’émotion de nos chers ados. Les témoignages candides qu’il recueille parlent d’eux-mêmes : « En vrai, on n’est pas trop stressés », commente Théo, « sur TikTok, tous les influenceurs disent que le brevet est plutôt facile ». « En plus, les anciennes générations nous ont dit que le brevet était très facile », renchérit Hector. Même son de cloche à l’issue : « Je n’ai jamais vu une dictée aussi simple. Aucun mot de vocabulaire compliqué », commente Rihanna. Une épreuve sans doute plutôt « ludique »…
Les profs eux aussi jouent leur partition et ont sorti gentiment cette année, on peut les féliciter, la carte classique : la dictée est une fable d’Ésope, Le Moustique et le Lion. La grammaire et la compréhension portent sur une fable de La Fontaine, Le Lion et le Moucheron. Mais ils savent déjà que leurs notes, si elles sont moucherons ou moustiques, deviendront lions, par la magie d’une réunion d’harmonisation au rectorat.
Les parents, « fidèles mais pas dupes », comme dirait feu l’académicien Michel Mohrt, les féliciteront, offriront même peut-être un petit cadeau en guise de récompense, mais n’en penseront pas moins. Une mère de famille de banlieue parisienne témoigne : « Il y a quelques années pour une épreuve, mon aîné n’avait pas entendu son réveil, et nous non plus ! C’était un lendemain de canicule, nous avions dîné tardivement dans le jardin pour prendre le frais, avec cette température, nous nous pensions déjà en vacances… il a quand même eu son brevet avec mention assez bien, malgré son zéro ! »
On est loin des affres du certificat d’études décrit par Colette dans Claudine à l’école, de son instituteur conduisant en grandes pompe ses meilleurs élèves endimanchés à la ville. À vaincre sans péril, on triomphe sans gloire. Comme pour le bac, dévalué comme un assignat de l’an IV, c’est un simulacre de rite initiatique auquel les adultes font semblant de croire pour ne pas faire de peine aux adolescents… ou un simulacre de rite qui initie à tous les autres, dans un pays qui empile les faux-semblants ? Simulacre d’élections, pour lesquels les médias se passionnent, quand tant de décisions sont prises à Bruxelles. Simulacre de droite, qui n’a plus rien de conservateur, simulacre de gauche, qui n’a plus rien de social. Simulacre d’indignation, face au discours touchant d’un vieil homme, par des antifascistes d’opérette, ou plutôt de club-théâtre de MJC subventionnée. Simulacre, bientôt de 14 juillet, devant une tribune pleine de députés NUPES antimilitaristes. Simulacre de 11 novembre, quelques mois plus tard, pour rendre hommage au sacrifice de poilus tombés pour défendre pied à pied, à la baïonnette, un mètre de terre française quand nos frontières sont aujourd’hui ouvertes à tous vents et continents.
Il est à noter, cependant – finissons sur une note positive -, qu’Ésope et La Fontaine n’ont pas été conspués sur les réseaux sociaux. Allez, un petit motif d’espérer. La situation catastrophique dans laquelle nous nous voyons n’est peut être, elle aussi, qu’un simulacre. Sait-on jamais.
Gabrielle Cluzel, Boulevard Voltaire
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