Articles : Jan. 2021 – Dec. 2020 – Nov. 2020 – Oct. 2020
Les études internationales se suivent et se ressemblent sur la descente aux enfers de l’enseignement en France. Curieusement, alors que le niveau des élèves, en particulier en mathématiques, discipline qui ne supporte pas l’à-peu-près, jamais il n’y a eu autant d’évaluations dans les établissements scolaires. Bien sûr, la critique porte sur les professeurs qui seraient mal formés, pas assez à l’écoute, et les bureaucrates du ministère déclarent que tout va bientôt rentrer dans l’ordre avec une meilleure formations des enseignants.
Du pain et des jeux
La réalité est beaucoup plus simple ! La majorité des élèves se contrefiche de ce que raconte leur professeur, ils trouvent que ce savoir est ennuyeux et inutile, le bruit de fond d’une classe devient un bourdonnement incessant et ils ne tolèrent la présence de l’enseignant que si celui-ci ne les dérange pas trop en parlant trop fort.
Pour eux, la vraie vie se passe par les échanges sur le smartphone, à travers les jeux ou par YouTube.
Comment les en blâmer, puisque les adultes passent leur temps sur leur portable ou en regardant les séries de Netflix ou la télévision ? Le temps nécessaire à la réflexion diminue ainsi de façon dramatique. Or, tout comme les muscles, un cerveau qui n’est pas utilisé s’atrophie et perd ses capacités. Le résultat est une baisse du niveau général de l’intelligence, autrement dit une crétinisation des masses.
Depuis plus de deux mille ans, l’intelligence humaine a atteint un plafond. Les anciens grecs ou romains avaient des capacités mentales égales ou supérieures au nôtres. Et des génies comme Euclide ou Newton n’ont rien à envier à nos chercheurs contemporains. Il existe encore des savants qui ont cette envergure, mais les capacités intellectuelles de la majorité de la population se dégradent, particulièrement en Occident. Les élites dirigeantes ont une culture générale plus faible qu’il y a seulement un siècle, et l’écart ne fait que s’accentuer…
Comme dans la Rome antique, le peuple semble se satisfaire de la demande de base : du pain et des jeux. De plus en plus de gens sont de gros bébés qui se satisfont des sucettes que leurs édiles leur accordent. Ils préfèrent souvent être malades pour se faire plaindre plutôt que de réagir et se prendre en charge. Les rues sont pleines de gens qui clopinent alors qu’avec un peu d’exercice, ils marcheraient normalement. Ils sont ravis d’écouter la propagande mercantile et les rythmiques abrutissantes que l’on nous fait prendre pour de la musique. Quand quelqu’un les agresse, ils pleurnichent et supplient au lieu de se défendre comme des hommes. Ce n’est sûrement pas sur eux qu’il faut compter pour défendre les libertés menacées. Ce type de population condamne la démocratie, car qui confierait les commandes d’un navire à de tels ignares ?
Le règne de l’intelligence artificielle
En regardant danser les robots de la compagnie Boston, je suis frappé du chemin parcouru en si peu de temps par les concepteurs de ces machines. Je me souviens qu’il y a seulement quarante ans, personne ne croyait qu’un programme d’ordinateur battrait des maîtres aux échecs. Aujourd’hui, plus aucun compétiteur n’ose se mesurer à ces programmes, les fabricants cherchent même à introduire des fautes volontaires pour que le joueur humain puisse avoir une chance de gagner. Contrairement à l’intelligence humaine, l’intelligence artificielle n’a pour l’instant pas de plafond.
Il est important de préciser que les créateurs de ces joueurs artificiels sont de moins bons joueurs qu’elles et sont dont incapables de prévoir à l’avance comment elle va jouer, sinon le programme serait sans intérêt. Cela démontre que les robots autonomes n’auront pas non plus un comportement prévisible, et seront donc susceptibles de faire des dégâts.
Les machines finissent toujours par prendre la place de l’homme dans des domaines de plus en plus étendus. L’histoire est jalonnée par des épisodes significatifs. La révolte des canuts qui a marqué le début de l’industrie textile, l’histoire de John Henry concurrencé par une machine pour poser les rails : invariablement l’homme perd toujours.
Certes, nous n’en sommes pas encore au point où les robots remplacent l’homme dans le domaine de la création artistique et la recherche scientifique. Mais le domaine de l’IA évolue très vite, les applications de ce que l’on appelle le « deep learning » (apprentissage profond) jouent un rôle de plus en plus important dans la recherche de nouveaux composés chimiques et de particules subatomiques. Et dans une dizaine d’années, l’ordinateur quantique sera au point, avec des capacités presque illimitées. La Chine a déjà fait fonctionner un ordinateur quantique, limité il est vrai à un type de problème très spécifique, mais qui nécessiterait des millions d’années pour qu’un ordinateur normal puisse le résoudre. Elle a déjà un réseau quantique opérationnel qui relie ses entreprises les plus importantes.
Le problème sera exactement le même que pour internet, qui est actuellement contrôlé par les GAFA , qui seuls possèdent les algorithmes permettant de faire fonctionner le réseau. Ce sont ceux qui payent les violons qui choisissent la musique, donc les magnats qui détiendront les clefs de ces machines intelligentes les feront travailler dans leur intérêt, mais pas dans l’intérêt du plus grand nombre. Les gentils robots d’Asimov avec leurs trois lois conçues pour ne pas léser les êtres humains n’ont aucune chance de voir le jour ! Ils seront au service des gens à la manière de Twitter ou de Google, c’est-à-dire qu’ils ne pourront rien faire qui aille à l’encontre des véritables maîtres de ces machines. Un avant-goût de ce qui nous attend nous est donné par la Chine, où les comportements de leurs citoyens sont épiés jusque dans leur intimité, et où des « points sociaux » récompensent ceux qui sont les plus obéissants.
Au fur et à mesure des avancées technologiques, les êtres humains vont abandonner ce qui faisait la spécificité de leur espèce, soit la capacité de comprendre le monde et de le modifier suivant leur intérêt.
Seuls survivront des îlots de connaissances comme les centres de recherches et les universités, tout comme les moines qui copiaient et conservaient les écrits. Nous sommes à l’aube d’un nouveau moyen-âge. Il est hors de doute que les mêmes personnes qui contrôlent le monde par le biais d’internet utiliseront ces nouvelles ressources à leur profit, court-circuitant des milliards de personnes qui deviendront, de fait, inutiles.
Et à votre avis, que fait-on des personnes inutiles ?
Gilles Mérivac, Riposte Laïque