. Allemagne : la révolte des gilets verts

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++ WEBTUBE : Les agriculteurs allemands ne décolèrent pas. Après la manifestation du 18 décembre à Berlin, une nouvelle mobilisation est en cours, du 8 au 15 janvier, destinée à faire pression sur le gouvernement d’Olaf Scholz. Soutenue par la Fédération des agriculteurs allemands (DBV), le principal syndicat agricole du pays, cette protestation est organisée contre la fin des subventions au diesel agricole. Une perte qui équivaut à « un milliard d’euros », a estimé le président de la Fédération, Joachim Rukwied, devant l’Agence France-Presse...

Saisie par l’opposition, en novembre dernier, la Cour constitutionnelle annulait 60 milliards d’euros d’investissement dans la « transition climatique », estimant que le gouvernement avait enfreint les règles constitutionnelles liées à la limitation de l’endettement. Sommée de revoir sa copie budgétaire des années 2023 et 2024, la coalition au pouvoir décidait de supprimer les subventions qu’elle jugeait « nuisibles pour le climat », au rang desquelles l’aide à l’achat de carburant pour l’agriculture.

Retrouver le sens de la PAC ?

Il n’en fallait pas plus pour pousser à la rébellion les agriculteurs allemands, lassés d’être la cible sempiternelle des écologistes. Car enfin, les agriculteurs, comme les pêcheurs, utilisent le gazole pour travailler. Et aucune solution alternative au carburant n’est connue, à ce jour, pour faire rouler leurs tracteurs ! Comme les gilets jaunes en leur temps, les gilets verts allemands ont vécu cet oukase comme une injustice.

Une fois dans la rue, les agriculteurs allemands ont brandi d’autres revendications.

Comme les autres agriculteurs européens, les agriculteurs allemands se plaignent de la Politique agricole commune (PAC) de l’Europe, devenue au fil du temps une vaste politique environnementale, ni vraiment agricole, ni vraiment commune. La PAC a totalement perdu de vue les cinq objectifs définis dans le traité de Rome, signé en 1957 :

  1. accroître la productivité de l’agriculture ;
  2. assurer un niveau de vie équitable à la population agricole ;
  3. stabiliser les marchés ;
  4. garantir la sécurité des approvisionnements ;
  5. assurer des prix raisonnables aux consommateurs.

À ce sujet — Révolte agricole : après l’Allemagne, la France ?

Comme les autres agriculteurs européens, ils dénoncent la stratégie « Farm to Fork » (de la ferme à la fourchette) adoptée par le Parlement européen qui, en se donnant des objectifs de « réduction des pesticides » et d’augmentation de l’agriculture dite « biologique », risque fort de sacrifier un peu plus encore l’autonomie alimentaire du continent et l’avenir de nos agriculteurs. C’est en tout cas l’avis de nombreux experts qui tirent la sonnette d’alarme sans être vraiment entendus.

Une Union européenne sous influence

Comme les autres agriculteurs européens, ils dénoncent le discours idéologique d’une Europe sous influence des ONG qui ignore tout ou presque des réalités scientifiques et est en train de tuer à petit feu tous les efforts de l’agriculture européenne et les fruits des progrès de l’agronomie.

Comme les autres agriculteurs européens, ils se plaignent de cette Europe toujours prompte à interdire et à réglementer sur son sol, mais qui signe des traités de libre-échange très généreux avec des pays qui ne sont soumis ni aux mêmes contraintes ni aux mêmes coûts de production, faisant du marché européen le nouvel « open bar » de l’agriculture internationale. Une agriculture du dumping social et environnemental qu’on importe à bas coût et qui permet de nourrir les Européens, pendant que les coûts de production de l’agriculture européenne explosent sous la multiplication des contraintes. Quand, dans le même temps, feignant de ne pas voir ce qu’il organise, le Parlement européen demande à la Commission d’intensifier ses efforts – y compris par l’adaptation des règles de concurrence – pour renforcer la position des agriculteurs européens dans la chaîne d’approvisionnement !

Comme les autres agriculteurs européens, enfin, ils se plaignent de l’avènement de la bureaucratie, un peu partout, en lieu et place du bon sens paysan. Pourtant, il nous semblait à nous, Français, qu’en matière de bureaucratie, les Allemands n’étaient pas les plus mal lotis… Il est loin, le temps où un agriculteur pouvait remplir seul son dossier PAC, sans l’aide d’un technicien spécialisé ou d’un consultant averti.

Les agriculteurs de France sont solidaires de leurs collègues allemands. Depuis quelques mois, en France, les panneaux de certaines communes sont retournés par les associations de Jeunes Agriculteurs. Comme leurs collègues allemands, mais avec d’autres méthodes, ils dénoncent cette France et cette Europe qui marchent sur la tête, comme nous l’écrivions avec David Lisnard, président des Maires de France, le 4 décembre dernier, dans Le Point.

Yves d’Amécourt, Boulevard Voltaire

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