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C’est bien connu, l’enfer est pavé de bonnes intentions. Comment ne pas penser à cet adage lorsqu’on apprend qu’un député Renaissance a déposé, le 10 mai dernier, une proposition de loi visant à instituer un contrôle technique obligatoire des biens immobiliers ? L’exposé des motifs de cette proposition nous explique que « l’idée est de créer un dispositif comparable à ce que prévoit le Code de la route en matière de contrôle technique du véhicule ». L’imagination est sans limites pour transformer les activités de la société en vaste jeu des Mille Bornes !
Objectif de cette belle idée ? Renforcer « le contrôle de la décence des logements », autrement dit accroître l’efficacité de la lutte contre « l’habitat indigne ». Intention louable à la lumière de l’effondrement récent d’un immeuble à Lille, ou à Marseille, rue d’Aubagne, en 2018. Événements que ne manque pas de rappeler ce parlementaire, Guillaume Vuilletet, député du Val-d’Oise, ainsi que les chiffres communiqués par la fondation Abbé-Pierre : « Le parc privé potentiellement indigne (PPPI) s’élève à près de 600.000 logements. » En extrapolant, on peut imaginer que plusieurs millions de personnes habitent ce PPPI, autrement dit, et en des termes plus explicites, des taudis, au regard des critères d’un grand pays développé du XXIe siècle… Triste constat, d’ailleurs, pour ce député macroniste : la situation s’est même « aggravée avec la période que nous traversons, faisant de la question de l’habitat indigne une urgence sociale absolue ». Bien sûr, c’est un peu la faute au Covid (de quoi n’est-il pas responsable, à part la guerre en Ukraine ?) : « La plupart du temps, les travaux visant à remédier aux situations d’insalubrité ont été mis à l’arrêt. » On n’a pas fini de découvrir les dégâts collatéraux du « quoi qu’il en coûte »…
Pourtant, il existe déjà tout un arsenal législatif et réglementaire, notamment la loi ALUR (loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové), portée en 2014 par Cécile Duflot. Une loi qui instituait, déjà, un « permis de louer ». Toujours cette idée des Mille Bornes ! La loi ALUR donne effectivement le droit aux communes d’exiger ce permis auprès des propriétaires mettant en location un bien pour la résidence principale. Cet outil est laissé à la diligence des maires pour lutter contre le logement insalubre, soit en demandant une simple déclaration, permettant des contrôles a posteriori, soit en imposant une autorisation préalable. En 2022, seules 388 communes, de toutes sensibilités politiques, ont instauré ce dispositif. Son efficacité ? On peut en douter, lorsqu’on voit que Lille et Marseille sont respectivement sous le régime de la déclaration et de l’autorisation.
Mais est-ce pour autant qu’il faut encore en rajouter dans cette manie de toujours plus légiférer et réglementer ? Car il s’agit bien d’en rajouter : « Ce dispositif vise à responsabiliser le bailleur qui serait dans l’obligation de consigner les observations effectuées et le diagnostic technique sur une plate-forme du ministère de la Transition écologique. Cette mesure, qui permettra en premier lieu une consolidation des diagnostics déjà existants, garantira que le local concerné respecte au moins la définition du décret décence de 1982 » (en fait, un décret relatif à l’hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu’à la prévention médicale dans la fonction publique !), explique le député Renaissance. À la différence du « permis de louer », laissé à la main des maires, connaisseurs par excellence de la réalité de l’habitat de leur commune, il s’agirait donc de constituer un vaste fichier national (« une plate-forme », pardon) avec, comme avantage, si l’on en croit le porteur de cette proposition de loi, de « faire porter la responsabilité de l’élaboration du document au bailleur ou au propriétaire ». Le propriétaire-bailleur, ce salaud a priori et bientôt, au rythme où vont les choses, ce héros du XXIe siècle. Et dire qu’Emmanuel Macron a osé dire qu’on légiférait trop, dans ce pays.
Georges Michel, Boulevard Voltaire
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