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°° WEBTUBE : « La République gouverne mal, mais se défend bien », la citation de Charles Maurras, inspirée par une phrase d’Anatole France, décrit bien un pouvoir qui sait se montrer fort, quand il est exercé contre une certaine partie de la population (révolte des gilets jaunes, mesures liberticides pendant le Covid). Mais cette force se transforme très vite en lâcheté dès qu’il s’agit des banlieues de l’immigration. C’est ce que nous présente Céline Cléber dans un roman dystopique qui expose la faiblesse de l’État, dans une France en proie à la guerre civile.
Mohammad, bientôt la trentaine, barbu rigoriste d’Île-de-France comme un autre, décide un soir d’été d’impressionner ses amis plus jeunes. Il veut se « faire un blanc » selon ses termes. Il prend son arme à feu et explose la tête du prêtre assyro-chaldéen de la paroisse de son quartier, puis tire sur les agents de la BAC qui interviennent. Dans la manœuvre, les policiers tuent un des adolescents présents sur place. En réaction, s’ensuit la nahélisation du pays et les nuits d’émeutes se succèdent.
Face à l’embrasement, l’État choisit de fermer les yeux, de calmer le jeu, que ce soit par peur de la réaction redoutée des quartiers de l’immigration (rappelant l’attitude du président Macron lors du décès du petit ange Nahel, qui avait accusé le policier alors qu’aucune enquête n’avait encore déterminé les circonstances du drame), et par idéologie (la fameuse culture de l’excuse).
Gouverner c’est prévoir, dans ce roman d’anticipation, la faiblesse d’un l’État en voie de désintégration, et qui ne sait plus rien prévoir, est affichée. Cette faiblesse est personnifiée par le personnage du ministre de l’Intérieur qui souhaite une « reconquête durable, calme et progressive », et ne parle que de prévention, et de compréhension à l’égard des jeunes de banlieue, comme la novlangue officielle a coutume de les appeler. Devant la lâcheté de ses collègues de l’administration, qu’ils soient membres du gouvernement, de la police, ou du ministère de l’Intérieur, le conseiller spécial sécurité de l’Élysée décide d’agir…
Le grand intérêt du roman est de faire vivre de l’intérieur les réactions (et surtout les absences de réaction) de tout l’appareil d’État face aux émeutes. Jour après jour et en temps réel, l’auteur nous emmène dans les coulisses, dans l’antichambre du pouvoir, où se prennent les décisions ; dans les salles de crise de la place Beauvau ou de l’Élysée, dans les réunions entre ministères, préfecture et directions du renseignement.
Un témoignage de l’intérieur
Haut fonctionnaire depuis plus de vingt ans, évoluant dans les plus hautes sphères du pouvoir national, l’auteur – qui écrit sous pseudonyme – connaît parfaitement la réalité des institutions, les rouages de l’État obèse, son mille-feuille administratif composé d’innombrables directions nationales, de comités et autres centres de décisions. Très bien informé sur le fonctionnement du ministère de l’Intérieur, il montre à quel point les capacités de réaction de nos institutions fragiles sont devenues quasi-inexistantes.
Il connaît surtout les agents de l’administration, et nous entraîne dans les coulisses d’un pouvoir où règne en maître le pasdevaguisme — cette tendance à éviter tout remous et à ignorer les problèmes de fond. Les calculs personnels et les basses manœuvres prévalent, les membres étant davantage motivés par la progression de leur carrière dans l’administration, et engagés dans une compétition permanente pour s’attirer les faveurs des puissants. À la moindre difficulté, ils n’hésitent pas à se défausser de leurs responsabilités.
Cette dystopie, bien ancrée dans les réalités du pays, aborde les éléments qui structurent les freins au retour de la France dans certains pans entiers du territoire : le rôle des hommes politiques bien sûr, mais aussi celui des journalistes, de l’école, la balkanisation des quartiers par ethnies, la violence des plus jeunes, l’expansion des réseaux islamistes, l’auto-gestion de certains quartiers, la circulation des drogues et des armes… Il n’y a plus grand-chose de doux dans la France de Céline Cléber, à part les institutions républicaines censées nous protéger…
Céline Cléber, Douce France, éditions du Toucan, 432 p
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