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Les candidatures à l’élection présidentielle doivent être déclarées dans les dix prochains jours. On attend toujours celle de Jupiter. Comme un deus ex machina de papier mâché, descendu sur la scène du théâtre antique à grand renforts de poulies secrètes, il attend évidemment le dernier acte. Il a déjà ses signatures. Il a déjà ses militants. Il a un site internet qui n’attend plus que lui. Que lui manque-t-il en somme ? Il se peut qu’Emmanuel Macron connaisse l’histoire ancienne, ou, plus vraisemblablement, qu’il flaire instinctivement sa trace jusque dans notre histoire récente. A Athènes ou à Rome, le stratège ou le consul étaient aussi des chefs militaires, qui avaient prouvé leur valeur et s’étaient bien souvent illustrés sur un sol barbare auquel ils avaient attaché leur réputation. Ainsi de César en Gaule ou de Scipion, dit l’Africain, qui mit fin à la deuxième guerre punique en battant Hannibal à Zama. Plus près de nous, Mitterrand l’Irakien, Sarkozy le Libyen, Hollande le Malien, tentèrent, à leur tour, d’accrocher leur étoile à un char de bataille – avec des fortunes très diverses.Notre bon maître a décidé, semble-t-il, d’être Macron l’Ukrainien. Il s’entretient avec toutes et tous, avec chacune et chacun. Il va de téléphone en visioconférence. Ce n’est pas un homme : c’est Hermès, le messager des dieux. Chaque matin depuis trois semaines, la guerre doit éclater dans les 24 prochaines heures, crient les Etats-Unis. Les médias le répètent en boucle, même si chaque matin, ils doivent se rendre à l’évidence : contre tous les pronostics, il n’y a toujours aucune guerre à l’horizon. L’opinion publique, qui a vite oublié l’éprouvette de Colin Powell aux Nations Unies en 2003, croit encore que les Américains peuvent dire la vérité de temps à autre. Macron est de ceux-là.Reçu par Poutine comme un stagiaire de troisième par un patron du CAC 40, il a, toute honte bue, publié dans la foulée un communiqué triomphant… aussitôt démenti par Moscou. Rebelote ce week-end : après avoir annoncé, dans la nuit de dimanche à lundi, qu’il avait arraché à Poutine la promesse d’un entretien avec Biden, il a été démenti illico par la Russie, qui a également rappelé, par la même occasion, qu’elle pouvait communiquer quand elle le voulait avec les Etats-Unis. Manière élégante – ou pas – de dire qu’entre grandes personnes, on n’a pas besoin de la mouche du coche. « J’annonce les employés, pas le patron », disait Pascal dans les Tontons Flingueurs. Autre temps, autres moeurs, ce sont désormais les employés de Washington qui s’annoncent, et les patrons qui, un peu embarrassés, les renvoient à la niche.Au moment de se lancer dans l’arène présidentielle, Emmanuel Macron, qui ne recule devant aucun grand rôle, pourra peut-être chanter, comme l’Italien dans la chanson éponyme de Reggiani : « Je reviens au logis / J’ai fait tous les métiers / Voleur, équilibriste / Maréchal des logis / Comédien, braconnier / Empereur et pianiste ». Il pourra ajouter « diplomate ». On ne sait pas si cela suffira à lui faire ouvrir la porte. Il est vrai que le ridicule, en ces temps ultra-rapides, non seulement ne tue pas, mais surtout ne coûte plus grand-chose. Sans quoi, de « c’est notre projet » à ce soufflet géopolitique, en passant par les gilets jaunes, la fête de la musique, le grand débat, « penser printemps » ou encore chacune de ses exaspérantes allocutions sur le Covid, Macron serait mort trente fois et ne pourrait même plus songer à se présenter.Pour conclure avec La Fontaine et la Mouche du Coche, fable qui va terriblement bien, ces jours-ci, à notre Bismarck de grande surface, rappelons-en la belle moralité :« Ainsi, certaines gens, faisant les empressés,S’introduisent dans les affaires ;Ils font partout les nécessaires,Et, partout importuns, devraient être chassés ».Partout importuns… devraient être chassés… et on ne parle pas que de la table des négociations !
Arnaud Florac, Boulevard Voltaire
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