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Une loi fondamentale de la thermodynamique démontre l’impossibilité de tout retour à l’état d’origine. Il s’agit de l’entropie : un système organisé ne peut que se dégrader vers le chaos final, et ce, d’une façon irréversible. L’exemple le plus imagé est celui d’un verre qui chute et qui se brise. Si aucune force extérieure n’agit sur les fragments, on aura beau attendre jusqu’à la fin des temps, jamais l’état initial ne sera restauré car jamais les éclats ne se réassembleront d’eux-mêmes pour reconstituer l’objet tel qu’il fut.
On peut tenter d’appliquer la loi de l’entropie aux sociétés humaines. Tout n’y est pas forcément irréversible. La vie, même si ce n’est que pour un temps limité, fait émerger du chaos de l’inerte une structure organisée et reproductible (tant que perdure l’énergie vitale, ce que chacun interprétera à sa façon). De même, la force et donc l’énergie de citoyens peut imposer des changements d’état à un système que l’on pensait être définitivement établi comme seule alternative, par le combat des idées, le verdict du vote et, parfois, par des révolutions. Ainsi, des orientations économiques aberrantes et leurs effets délétères peuvent toujours être inversés à l’occasion de changements de régimes politiques, même s’il faut toujours plus de temps pour rebâtir que pour déconstruire. Beaucoup d’efforts et de sacrifices seront nécessaires pour revenir à l’état initial, mais cela reste possible en matière économique. L’avenir n’est pas hypothéqué de façon définitive.
Qu’en est-il du changement de peuple – et donc de civilisation – que nous acceptons ou que nous subissons depuis plus de quatre décennies ? Le retour en arrière (ou, a minima, la stabilisation) dépend de la « force » que l’on veut appliquer au système en place. Sans cette « force » et, donc, sans la volonté y étant attachée, il est illusoire de croire que du chaos en expansion renaîtra la forme antérieure. L’état final sera différent, une sorte d’ordre nouveau, harmonieux ou toxique, selon que l’on soit partisan ou opposant du grand mélange des cultures et des peuples. Ainsi, si on renonce à toute « force » en considérant le phénomène comme étant inéluctable, notre système civilisationnel évoluera de lui-même vers le désordre total. L’intensité de la « force » peut, non pas stopper le processus mais le ralentir, retarder l’échéance, différer la chute de Rome, faire gagner à nos descendants deux ou trois générations, guère plus.
Que faire ? S’en laver les mains en ânonnant « Après moi le déluge » ? Accepter en composant pour le mieux ? S’en réjouir en agitant aux frontières de Schengen des pancartes « Willkommen » ? Redevenir barbares en appliquant la « force » la plus intense ? Attitude qui a fait ses preuves dans le passé comme elle a aujourd’hui été mise en œuvre par d’autres nations moins regardantes sur les droits de l’homme, pratiquant sans retenue les épurations ethniques, comme les Kosovars le firent pour les Serbes. On peut douter que cela soit souhaitable et même possible à l’aune de nos tempéraments dévitalisés, de notre morale suicidaire, de notre position élevée sur l’échelle de la décadence, position que d’autres considèrent comme étant un signe de progrès.
S’offrent alors bien peu d’alternatives : combattre pied à pied, plus pour le panache de la vieille garde que pour la victoire finale ou bien se préparer à une émigration pour les plus aventureux ou pour les plus réalistes… Direction l’Alaska, la Sibérie ou la Patagonie – le prix du foncier y est aujourd’hui peu élevé et le climat y sera demain tempéré. Vendre les possessions et les bibelots superflus, serrer dans une malle la clef de la demeure ancestrale, les albums de famille, les livres enluminés, les recettes de nos grands-mères et les tromblons de nos grands-pères, armer des canonnières et partir, au bout des océans, refonder dans des terres vierges le nouveau camp des saints… pour sauver ce qui peut être sauvé afin que ce que nous avons bâti ne soit pas qu’un trou dans l’eau dans l’histoire du monde.
Frédéric Sahut, Boulevard Voltaire
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