Loire-Atlantique. Pour l’aumônier diocésain, s’opposer aux occupations de terrains par les gens du voyage revient à les stigmatiser

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De quoi le diocèse de Nantes est encore le nom ? Interviewé par le Courrier du Pays de Retz, le père Christophe Sauvé, aumônier diocésain des gens du voyage, s’en prend à ceux qui dénoncent l’installation illégale des « voyageurs » sur des terrains.

« Je déplore l’attitude de certains qui arrivent comme cela sur un terrain, mais le dialogue politique sur le sujet n’est pas simple. […]. Il y a toutes les questions de cohabitation. Il y a des réactions et les gens se lâchent, après avoir été confinés. Le tissu social se dégrade. Dans les campagnes, dès qu’ils se passent un truc, on dit «  c’est les manouches  ». En ville, c’est la faute d’autres populations. Un groupe de caravanes est synonyme d’insécurité dans l’inconscient collectif ».

On se demande bien pourquoi. En 2019 des opérations menées dans des camps de gens du voyage à travers toute la Charente avaient permis d’interpeller plusieurs cambrioleurs chevronnés et retrouver le butin d’une centaine de vols et de cambriolages. En février 2021, quatre prévenus du même clan familial de voyageurs étaient jugés pour quarante cambriolages à la Rochelle. En janvier 2021 six « voyageurs » étaient interpellés sur des camps à Rennes en lien avec 24 cambriolages dans des entreprises de la région, pour un butin de 700.000 euros.

En 2020 dans le Nord, des gendarmes saisissent 150 objets dans des camps de « voyageurs », des armes aux bijoux en passant par des bouteilles de vins, provenant de divers cambriolages dans le Nord, le Pas-de-Calais et l’Aisne. La même année, quatre « voyageurs » étaient interpellés à Rennes pour 97 cambriolages dans toute la France en un mois… mais il est préférable de s’en prendre à « l’inconscient collectif » et ses chimères.

En revanche, les problèmes d’occupations illégales se répètent avec le même cortège de tensions et dans les mêmes secteurs (littoraux et sud-Loire) d’année en année, ce qui relève au moins d’un défaut d’anticipation que relève le père Sauvé : « tous les problèmes décrits se répètent tous les ans. On ne travaille pas assez au niveau du schéma départemental. Il n’y a toujours pas de proposition de terrains familiaux à caractère locatif, qui peut être une solution. Cela nécessite de revoir les règlements d’urbanisme pour autoriser les familles à s’installer dans des terrains ».

Car les « voyageurs » sont de plus en plus sédentaires – nous l’écrivions déjà en 2014 : « au-delà du cliché connu de la caravane ou du campement, une nouvelle réalité émerge de plus en plus nettement au sein des gens du voyage : la sédentarisation, qui les pousse à rester plus longtemps sur les aires ou à acheter des terres. Il a été relevé en 2007-2008 sur les aires officielles d’accueil des gens du voyage en Loire-Atlantique que 14% des ménages restaient au moins six mois et 7.4% plus de neuf mois ».

Le père Sauvé continue : « C’est un fait, les familles se déplacent moins mais elles souhaitent garder un habitat mobile. Beaucoup d’entre elles veulent se sentir réellement habitant d’un endroit, sachant aussi que les voyageurs ne bougent plus l’hiver. Avec le confinement, des familles ont rejoint du travail de droit commun. Des familles, notamment les personnes les plus âgées, lâchent le voyage car c’est invivable, avec toutes les contraintes à la libre circulation des personnes et des biens […] Et quand on est sur une aire d’accueil, on n’a pas d’aide au logement, la caravane n’étant pas reconnue comme telle. Le terrain familial est un bon moyen de répondre aux demandes et de permettre l’accès aux dispositifs d’aides ».

Seulement, trouver des terrains d’accueil en Loire-Atlantique, notamment dans la bande littorale et l’agglomération de Nantes, semble assez difficile du fait des appétits immobiliers et des impossibilités légales – liées notamment à la proximité des cours d’eau ou du caractère inondable des terrains disponibles. Il faut surtout anticiper, sinon les occupations illégales sont appelées à se reproduire d’année en année.

Louis Moulin, Breizh-info.com

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