. Fanny Ardant défend Gérard Depardieu : une leçon d’honneur

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Articles    : Mar 2025Fev 2025Jan 2025Dec 2024 – Facebook : https://www.facebook.com/profile.php?id=100069673161887 Twitter : https://twitter.com/OrtfNews Music 24/24 : http://DJMUSIC.fr

WEBTUBE : Fanny Ardant est une femme libre. Elle aime vivre intensément, elle aime vivre dangereusement. Elle est fière, elle semble inaccessible. On la trouve bourgeoise ? Elle choisit des rôles à contre-emploi. On la croit de gauche ? Elle cite de mémoire des passages entiers de Pasolini, dans lesquels il fustige le psittacisme des petits gauchistes. Il y a une chose, toutefois, qui ne surprend jamais chez elle : sa sincérité.

Une femme libre et courageuse

Cette semaine, elle est venue témoigner en faveur de son vieil ami Gérard Depardieu. À vrai dire, on l’écouterait témoigner en faveur de n’importe qui, de sa voix sublime qui effleure les consonnes et caresse les voyelles. Mais là, elle était bien seule. En noir. Elle a commencé par dire que beaucoup de gens avaient eu peur de venir parce que cette fidélité à Gérard Depardieu aurait signé leur arrêt de mort, une mort sociale et professionnelle, dans un milieu du spectacle subitement passé du droit de cuissage à la chasse aux sorcières.

Elle s’en fout, Fanny Ardant. Elle est de l’époque où on tolérait des choses qui semblent aujourd’hui intolérables. Elle sait que son ami Gérard n’est pas un finaud. Elle ne cherche pas à l’excuser. Il n’est d’ailleurs pas excusable. Il est condamnable et même condamné. Simplement, elle est là, debout, impériale, comme un clin d’œil à un monde qui s’en va. Comme la protagoniste de Madame rêve, de Bashung, qu’elle incarna dans le clip de la chanson, peut-être ne veut-elle rien d’autre, dans la vie, depuis toujours, qu’« un amour qui la flingue », et elle sait sans doute que ces amours-là ne mûrissent pas avec des tableurs Excel de pratiques sexuelles tolérées et des formulaires de consentement.

À ce sujet — « Depardieugate » : le bal des faux-culs

L’ogre et la panthère

Gérard Depardieu est sans doute un ogre, mais Fanny Ardant, elle, est une panthère. Fidèle, pleine de panache et souverainement étanche à l’opinion des autres. Elle a embrassé son ami après avoir dit son affection pour lui. Un geste plein de grandeur, d’amitié, d’honnêteté. Un geste d’autrefois, parce qu’elle sait (elle l’a dit) qu’elle est du monde d’avant. Habituée des films à costumes, qu’elle a parfois sauvés de sa seule présence, elle rend petit et médiocre tout ce qui se dresse face à elle. La boue ne l’atteint pas. Les indignations toutes faites non plus. Elle fait taire, d’un battement de cils, tout ce qui pourrait tenter de lui donner des leçons.

On peut se féliciter de la libération de la parole et de la fin du harcèlement sexuel systémique dans le cinéma. On peut aussi se dire qu’une époque comme la nôtre ne produira plus jamais de femmes semblables à celle-ci. De vraies femmes, ni soumises ni hurlantes, qui n’ont pas besoin de carburer à la haine pour tracer leur chemin et se faire une place aux côtés des hommes, et non face à eux. Oui, Fanny Ardant était bien seule, parce que son geste était infiniment au-dessus du lot et que de telles manifestations d’amitié, émouvantes et même admirables, ne courent pas les rues.

Si Depardieu est coupable, rien ne justifie son comportement. En revanche, qu’il soit coupable ou innocent, rien ne justifie une telle curée. C’est tout cela qu’un tel geste rappelle. La panthère au secours de l’ogre : on dirait presque un film, un film triste et sans leçons de morale, dont on sort mélancolique et songeur.

Arnaud Florac, dans BV