La Chine exporte du gaz russe vers l’Europe en catimini

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Au cours des six premiers mois de 2022, les importations de gaz naturel liquéfié (GNL) dans l’Union européenne ont augmenté de 60 % par rapport à l’an dernier, indique le cabinet d’études KPLR. L’Union européenne a ainsi importé quelque 53 millions de tonnes de GNL, cette année. Dans ce contexte, la Chine, apparaît bel et bien comme le « chevalier blanc inattendu » de l’Europe. Celui qui se porte à sa rescousse énergétique. C’est elle qui a permis à l’Union européenne de constituer des réserves de gaz plus vite que prévu, très largement grâce à du gaz naturel liquéfié.

Pour la petite histoire, en juillet dernier, l’empire du Milieu a acheté un total de 2,35 millions de tonnes de GNL à la Russie – d’une valeur de 2,16 milliards de dollars. Le volume des importations par la Chine en Russie a augmenté de 28,7 %. La Fédération de Russie peut se targuer de s’être hissée ainsi à la quatrième place en tant que fournisseur de GNL à la Chine, devançant l’Indonésie et les États-Unis. Et il va sans dire que cette quatrième place ne tient pas compte du fameux gazoduc du producteur russe Gazprom Power of Siberia qui livre quotidiennement du gaz à la Chine. Les livraisons de Power of Siberia ont augmenté, elles, de 63,4 % au premier semestre 2022. Pour mémoire, Power of Siberia est le deuxième gazoduc alimentant la Chine en gaz naturel, en termes de volume, derrière le Turkménistan.

Du gaz « blanchi »

On pourrait s’interroger sur cette augmentation inhabituelle des importations russes de GNL. On sait que la Chine importe plus de la moitié du gaz naturel qu’elle consomme, dont environ les deux tiers sous forme de GNL, et la demande a fortement chuté, cette année, dans un contexte de récession. La Chine, qui tient à garder d’excellentes relations gazières avec la Russie, s’est bien gardée de révéler la provenance de ce gaz. L’administration générale des douanes de Chine a, du reste, « blanchi » le gaz en provenance de Russie en indiquant tout simplement qu’il était estampillé « chinois ». L’administration générale des douanes de Chine a cessé de publier la répartition du volume des échanges de gaz naturel par pipeline depuis le début de l’année, le porte-parole Li Kuiwen confirmant que cette décision visait à « protéger les droits et intérêts commerciaux légitimes des importateurs et exportateurs concernés ».

C’est ainsi que la Chine revend discrètement du GNL russe au seul endroit qui en a désespérément besoin et plus que tout, à savoir l’Europe. Et il va sans dire que les marges bénéficiaires sont très appréciables. Dans cette perspective, les traders en contrats à termes de Shanghai estiment que les bénéfices générés pourraient atteindre 100 millions de dollars. Les affirmations de ce trader ont été corroborées par le plus grand raffineur de pétrole de Chine, la Sinopec. Cette dernière a d’ailleurs aussi reconnu qu’elle avait acheminé l’excédent de GNL vers le marché international.

Une situation ubuesque

Qu’on y songe : la Sinopec aurait à elle seule vendu 45 cargaisons de GNL, soit environ 3,15 millions de tonnes. La quantité totale de GNL chinois qui a été revendue est probablement supérieure à 4 millions de tonnes, ce qui équivaudrait à 7 % des importations de gaz de l’Europe au cours du premier semestre de cette année.

Tout ce GNL, bien que comptabilisé par les douanes comme du « GNL Chinois », émane en partie ou en totalité de la Russie. Les politiques qui nous gouvernent vivent en Absurdie : ils imposent des sanctions contre Moscou puis achètent du GNL russe… à la Chine. Mais pas au même prix !

Olivier d’Auzon, Boulevard Voltaire

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