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Dans « Le temps du débat d’été », sur les ondes de France Culture du jeudi 18 août, le thème retenu est : « Écologie : faut-il contrôler les modes de vie des très très riches ? ». Petit fumet de lutte des classes, on est dans la France intello ou on ne l’est pas. En retard d’un mur de Berlin, mais qu’importe, c’est le charme discret de la bourgeoisie de gauche à la française.
Le pire n’est pas là mais dans le fait d’envisager de « contrôler les modes de vie ». Pour se dédouaner et se donner une justification morale, on annonce qu’il s’agit des « très très riches », mais dans le cours du débat, on passera du 1 % de très très riches aux 10 % de riches, puis aux pays développés par rapport aux pays émergents ou en voie de développement.
Le péché capital est bien évidemment « l’empreinte carbone » trop forte des riches par rapport à celle des moins riches. Mais si le chef d’une entreprise multinationale doit faire le tour de ses filiales à travers le monde pour présenter ses comptes et rencontrer les investisseurs sur place, on imagine mal qu’il le fasse en navire à voile. De même pour les déplacements des chefs d’État. Il est des comparaisons qui n’ont aucun sens car les rôles, les fonctions et les obligations ne sont pas les mêmes. Et en tout état de cause, ces déplacements personnels ne sont pas la source du problème du réchauffement climatique. À supposer que celui-ci soit effectivement dû à 90 % aux activités humaines, ce ne sont pas ces déplacements de quelques personnes qui sont en cause mais les activités économiques, les bâtiments et les transports dans leur ensemble.
Les technologies modernes permettent le traçage des vols des avions de ligne comme des jets privés. On réalise vite qu’il y a là comme un flicage insupportable si l’on sort des nécessités de la sécurité aérienne pour tomber dans une dénonciation personnelle au nom d’une prétendue « justice climatique », notion absurde et faussement morale. Car bien évidemment, les phénomènes climatiques, qui sont des phénomènes de long terme, conditionnés par des mécanismes naturels complexes, ne peuvent être imputés à telle ou telle catégorie de personnes. Ce qui ressemblerait à la recherche d’un bouc émissaire chargé de tous les péchés et que l’on pourrait accuser de tous nos maux. Vieille ritournelle totalitaire trop connue. On nous a déjà fait le coup du bourgeois ennemi de classe, du Juif ennemi de race, on nous invente aujourd’hui le climato-coupable ennemi de la planète, voué aux vitupérations de Greta Thunberg et désigné à la détestation de jeunes gens manipulés qui semblent réagir aux slogans comme par réflexe pavlovien.
Nos débatteurs ont tout de même reconnu que l’on n’était pas « forcément responsable » de ses émissions de carbone. Ouf ! Notamment les gens qui vivent dans des zones rurales et qui sont tributaires de l’automobile mais ne doivent néanmoins pas être « stigmatisés ». On respire, merci pour eux. La solution ? Les politiques publiques, bien sûr. Des chemins de fer et des pistes cyclables. Remarque tellement typique du bobo urbain. Dans bien des cas, en zone rurale, il faut faire entre dix et cinquante kilomètres par jour pour aller travailler et revenir de son travail. La bonne vieille bicyclette, sans doute utile pour des parcours courts et dans une géographie pas trop accidentée, n’est évidemment pas la solution. Sans même évoquer les conditions météorologiques, de la pluie au froid en passant par la canicule… Néanmoins, partout fleurissent les subventions aux bicyclettes électriques, ce qui, dans bien des cas, revient à subventionner les loisirs plutôt qu’une alternative sérieuse à l’automobile. Aux dépens des finances publiques, donc de notre argent. Alors que l’effort utile devrait porter sur la rénovation énergétique des bâtiments.
Quant à l’atteinte à la vie privée que représente ce traçage, il conviendrait de la mettre en balance avec le droit collectif « de vivre dans un environnement sain et propre ». Certes, personne ne souhaite vivre dans une décharge, mais si l’atteinte à la vie privée est juridiquement aisément définissable, la notion d’environnement sain et propre est plus difficile à définir avec précision. De surcroît, sauf dans le cas d’une pollution volontaire caractérisée, la responsabilité personnelle d’un individu ne peut évidemment être envisagée pour la qualité globale de l’environnement, d’autant plus lorsque l’on parle d’émissions de carbone.
Mais rassurez-vous, braves gens, les activistes écolos veillent sur vous et feront votre bonheur malgré vous. Ils vous disent déjà que vous mangez trop de viande ou trop de poisson. Après avoir fait la police de vos déplacements et de vos modes de déplacement, ils feront la police de vos assiettes. Ils vous expliqueront aussi que vous avez trop d’enfants et que c’est mauvais pour la planète. Ils en viendront aussi à faire la police de vos nuits. Bienvenue dans le meilleur des mondes !
Stéphane Buffetaut, Boulevard Voltaire
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