Pourquoi la France fait face à un risque d’effondrement ?

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Avec des Bourses au plus haut et sans visibilité sur l’inflation à venir, le spectre de l’intervention des banques centrales préoccupe les investisseurs ; les Bourses jouent donc au yo-yo, plombées par la peur de l’inflation, mais elles sous-estiment les risques de faillites d’entreprises et de pertes financières pour les banques.

Afin de juguler l’inflation, la Fed pourrait diminuer ses achats d’actifs obligataires qui s’élèvent à 120 milliards de dollars par mois ; elle imagine cette possibilité pour fin 2021-début 2022, mais il est possible qu’elle soit obligée d’intervenir beaucoup plus tôt. Pour l’instant, suite à la vente de titres obligataires par les investisseurs, le taux des bons du Trésor à dix ans est de 1,672 %. Quant à la BCE, en raison des taux d’inflation actuels très bas en Europe, il n’est pas question de diminuer les achats de titres obligataires, et les taux d’emprunt augmentent très lentement (0,244 % en France et 1,081 % en Italie). Si les taux d’intérêt devaient augmenter brusquement en 2021, suite à une inflation qui augmente, à un niveau d’endettement des États de plus en plus élevé et à une croissance économique insuffisante, la BCE se trouverait dans une situation impossible, devant alors choisir entre la peste de l’hyperinflation inacceptable (augmentation des achats de titres) et le choléra des taux d’intérêt élevés (diminution des achats de titres) et, donc, de la banqueroute des États (France et Italie).

Au-delà du risque d’inflation, suite à l’augmentation de la masse monétaire par les banques centrales, il y a également un risque d’inflation par les coûts. Au manque de conteneurs pour le transport maritime, à la pénurie de puces électroniques, à la hausse d’un grand nombre de matières premières telles que le cuivre, le bois, le lithium, de nouvelles pénuries apparaissent : manque de pneus et de caoutchouc et même de palettes en bois et de clous ! Les palettes en bois ont augmenté de 50 % en un an et le prix des clous de 36 %. Les entreprises du BTP éprouveraient aussi de grandes difficultés pour effectuer leurs achats nécessaires aux chantiers. Il semblerait que la Chine ait acheté de grandes quantités de caoutchouc partout dans le monde. Les Chinois chercheraient à se débarrasser de leurs dollars qui ne leur rapportent rien en achetant et stockant des matières premières susceptibles de flamber dans les mois qui viennent.

L’Institute of International Finance explique comment la réponse à la pandémie Covid-19 a ajouté 24.000 milliards de dollars à la montagne de la dette mondiale qui a atteint, en 2020, un nouveau record historique à 281.000 milliards de dollars. La BCE, de son côté, alerte sur les risques élevés de crise financière. Les faillites vont se multiplier car les taux d’endettement ont bondi de 220 % des fonds propres, fin 2019, à 270 % en moyenne, fin 2020, pour les 10 % des entreprises les plus endettées. Les États de la zone euro vont donc aussi faire face au dilemme de la faillite des entreprises ou des dépenses trop importantes du « quoi qu’il en coûte » car l’endettement moyen des États de la zone euro est passé de 86 % du PIB, en 2019, à 100 %, en 2020.

Les dilemmes seront encore d’autant plus cornéliens dans la zone euro qu’une hausse des défaillances d’entreprises fragilisera très fortement les banques. Ces dernières devront augmenter leurs provisions pour créances douteuses, tout en étant exposées à un risque de correction du prix des actions, voire de l’immobilier. Il se trouve que la rentabilité des banques européennes est actuellement très faible (1,3 % de rentabilité des capitaux propres, alors qu’elle était de 5,3 % avant la pandémie) et qu’elle est de 10 % pour les banques américaines. La rentabilité devrait progresser un peu de nouveau, mais la BCE ne voit que les mariages entre établissements (avec, donc, des licenciements pour diminuer les coûts) afin de remédier aux problèmes structurels du secteur.

Pas besoin, donc, de sortir de Polytechnique pour réaliser que les propos optimistes du gouvernement ne correspondent en rien à la gravité de la situation en France au sortir de la crise sanitaire. Si l’on ajoute au risque économique, financier et boursier un risque non négligeable de crise politique, d’explosion sociale ou populiste, parler de risque d’effondrement de la France n’est pas exagéré.

Marc Rousset, Boulevard Voltaire

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