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++ WEBTUBE : Même si mort le 5 décembre 2017, c’est comme si Johnny Hallyday vivait encore, entre chansons inédites exhumées et exposition itinérante. La preuve en est ce documentaire de Figaro TV, La France rock and roll, qui sera diffusé ce 6 décembre. Si Le Figaro, pas précisément la bible des amateurs de musiques électrisées et de Harley chromées, s’y met, c’est donc qu’il y a un peu anguille sous le Perfecto™.
📺Mercredi 6 décembre ne manquez pas le documentaire Johnny Hallyday, La France Rock'n Roll
— Le Figaro TV (@LeFigaroTV) December 3, 2023
➡️Une coproduction @kuivprod – Michel Rotman et @Inafr_officiel avec la voix de Richard Berry
➡️À 20H30 sur Figaro TV IDF🎸 pic.twitter.com/Ksz1YVXJyC
À ce sujet — Le roi Johnny est mort ? Vive le roi !
D’ailleurs, quid de cette France rock and roll ? Pas besoin d’en appeler au carbone 14 pour en dater l’intrusion en nos contrées. Ainsi nous vient-elle de ces bases américaines ici implantées au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Le soft power US dans toute sa splendeur : jeans Levis™ 501, cigarettes blondes, Coca-cola™ et chewing-gum. Et la musique qui va avec.
Certes, personne en France n’a attendu les troupes d’occupation pour s’ouvrir au jazz. Charles Trenet en faisait déjà et c’est à Hugues Panassié, à la fois militant d’Action française et l’un des fondateurs du Hot Club de France, que l’on doit les premiers enregistrements de Louis Armstrong. Et qu’est-ce que le rock, si ce n’est un enfant du jazz, lui-même rejeton du blues et adaptation de nos ritournelles européennes ?
Vivre à l’américaine…
Il n’empêche, la jeunesse d’alors vit à l’heure américaine. Et cette musique, jusque-là et ici réservée à un cénacle d’amateurs éclairés de devenir, plus qu’une industrie, un véritable mode de vie, le fameux American way of life [mode de vie américain, NDLR]. Logique : les Français ont inventé le cinéma, mais ce sont les Américains qui ont créé Hollywood.
Un certain Jean-Philippe Smet est de ces jeunes. Abreuvé de westerns et de sodas, il commence à monter tout jeune sur les planches, déguisé en cow-boy, marchant dans les pas de cet Yves Montand qui chantait naguère Dans les plaines du Far-West. Il est vrai que cette identité de substitution a tout pour faire rêver, surtout en une France ou l’accordéon règne en maître. Bref, le soft power US dans toute sa splendeur, et qui ne sera pas pour rien dans la défaite de l’URSS, au terme de la guerre froide.
Contre Elvis Presley, Les chœurs de l’Armée rouge ne peuvent pas lutter. Tout comme entre Marilyn Monroe et la fermière soviétique exhibant sa couperose, juchée sur un tracteur de kolkhoze, il n’y pas photo. Mickey vainqueur par KO contre l’oncle Joe, donc.
Dans ses mémoires, Et moi, et moi et moi (Cherche Midi), Jacques Dutronc, l’un des anciens de la bande de La Trinité, admet aujourd’hui que le futur Johnny sortait du lot. Il savait que star il deviendrait, parce qu’avant même de devenir connu, il en était déjà une.
Protégé de Piaf et de Brassens…
D’autres ne s’y étaient d’ailleurs pas trompés, le prenant tôt sous leurs ailes, Édith Piaf ; Georges Brassens, surtout. Et pourtant, sa carrière fut toujours faite de hauts et de bas. Un jour rocker et l’autre hippie, à la fois crooner et biker : le ridicule ne lui faisait pas peur. D’où ces coupes de cheveux frôlant souvent l’apocalypse capillaire, sans oublier des costumes de scène défiant l’entendement : Mad Max en peau de lapin, Matrix arrivant sur scène, accroché au filin d’un hélicoptère, ange aux yeux de laser, façon Guerre des étoiles, débarquant dans une main géante qui s’ouvrait un soir sur deux ; on en passe et des meilleures. Des pires, surtout.
À part lui, personne n’aurait survécu à une telle grandiloquence. Mais Johnny n’était pas n’importe qui, justement. Il brûlait la vie par les quatre bouts – drogue, femmes, alcool et nuits blanches – mais demeurait phénix, tirant sa force de l’amour de son public. En effet, dans un monde de faiseurs, Jean-Philippe Smet n’était ni dans la posture et encore moins dans l’imposture, considérant son art comme une offrande à ceux venus l’entendre.
Le lendemain de sa mort, le musicien Bertrand Burgalat, fondateur du label Tricatel, nous confiait : « Il y a une notion qu’on apprend en sport ou en montagne, celle d’engagement. Sur scène, il faut y aller. Si on est là à se regarder les pieds en se demandant ce qu’on fait là, ça ne marche pas. Johnny, au contraire, son engagement est total et je trouve réconfortant que cet engagement ait été payé en retour par la fidélité du public. »
Il est un fait que ce dernier ne s’y est jamais trompé. Le roi Johnny est mort ? Vive le roi !
Nicolas Gauthier, Boulevard Voltaire